Arrivée de mauvais grés.

AdalrikKirke…

Karl Tötchenheim détestait cet endroit.

Pire, il le répulsait, littéralement.

Ces mornes plaines balayées sans cesse par les vents glacés venus du Grand Nord, ce paysage sans relief, d’où émergeaientt par intervalles quelques îlots d’humanités, l’écoeuraient au plus haut point. Quant à trouver refuge dans une église, fusse t’elle parfaitement aménagée pour les besoins de ceux de sa race, quelle étrange ironie avait donc bien pu se saisir de Sigvald Ibsen ? Le bavarois soupçonnait le fondateur de son Clan d’avoir gardé une certaine nostalgie de sa première vie en tant que prêtre.
Lui-même n’était déjà venu qu’une fois dans le grand Nord, il y a environ 150 années de cela, lorsqu’il entendit parler pour la première fois du Clan. Il y était resté aussi brièvement que possible, avant de rejoindre ses chères montagnes natales.
Mais à nouveau on avait fait appel à lui. De récentes découvertes avaient été opérées, et le Clan avait besoin de tous les Savoirs pour progresser dans la quête de l’Elixir. Et Tötchenheim en savait trop pour rester à l’écart. Il avait du se résoudre à quitter son fort des Wildenstein pour gagner les cotes nordiques, et de là cette sombre demeure , près d'Oslo, l'antre de ceux qui se nommaient les Dragons.

Devant l’imposante entrée de l’église, le bavarois fit halte et posa ses lourds paquetages. Il se baissa et siffla par deux fois. Une modulation stridente, un bruit qui n’avait rien d’humain, plutôt un signal d’appel entre deux prédateurs. De la brume environnante surgit alors une bête, un dogue à l’encolure impressionnante, le poil sombre et un éclat sauvage dans les pupilles. La bête se mit à trotter et vint lécher la main de son maitre qui lui murmura avec une forme de tendresse.

« Meine süße Olga, jetzt bist du wieder frei. Bald werde ich zurückkommen. „

La bête gronda un instant puis soudain s’élança à nouveau dans la brume. Karl la regarda disparaître, puis remit ses paquetages sur l’épaule et pénétra dans l’Eglise.